Choisir, Naître et Grandir... la fin d'une asso

C’est le nom d’une association tourangelle, créée en 1991. Le dernier évènement a eu lieu hier. Nous avons clôturé lors d’un repas au restaurant avec les personnes qui ont été actives depuis les débuts.

C’était beau de voir toutes ces personnes se retrouver après plusieurs années. Et moi, qu’est-ce que je viens faire là dans cette histoire… Laissez-moi vous raconter…

J’ai connu CNG par mon médecin traitant. Pendant ma grossesse, perdue de voir que la vie de famille ne serait pas celle attendue, le Dr Dubois-Péron me disait d’aller les voir, de prendre contact. J’ai longtemps regardé leur site internet. Mais j’avais l’impression que ce ne serait pas pour moi. J’y voyais des familles heureuses et moi toute seule avec mon gros ventre j’avais l’impression que je n’y aurai pas ma place. Et j’avais pas envie de voir des papas...

J’ai donc laissé l’information décanter et j’y suis allée quand ma fille avait 2 ans. Et je m’y suis sentie bien, c’est pour ça que j’y suis restée jusqu’à aujourd’hui. J’ai découvert des gens qui pensaient comme moi, qui avaient accouchées à la maison (je savais pas ça possible !), qui faisaient l’école à la maison, qui fréquentaient les écoles alternatives, qui allaitaient des bambins, qui mangeaient végétarien, sans gluten, sans lactose… Ca parait courant, mais il y a plus de 10 ans pas vraiment ! Je passais pour une extra-terrestre quand je disais que je ne mangeais pas de viande, on m’a traitée de folle quand je disais que je voulais accoucher sans péridurale, on me regardait de travers quand j’allaitais ma fille de 6 mois… Alors d’être entourée de toutes ces personnes, c’étaient une bouffée d’air pour moi. Je me souviens des papotages chez les unes et les autres, des tenues de stands pour des salons de l’enfance, des livres que je découvrais, c’est là où j’ai entendu parler de Michel Odent pour la première fois. C’est toutes ces discussions, ces personnes avec des convictions profondes, qui m’ont aidée dans ma maternité, dans ma façon de penser la naissance et qui a influencé mon travail actuellement. Peut-être que si je n’avais pas croisé CNG je serai toujours infirmière en psychiatrie !

Et hier soir, d’avoir toutes ces femmes qui racontaient les débuts de CNG, comment ils étaient perçus, les anecdotes, les ateliers, les rencontres… Je me dis qu’aujourd’hui nous n’avons rien inventé et que j’ai encore beaucoup à apprendre de tous ces gens là !

Au début il y avait des professionnels, des médecins, des sages-femmes, des kinés-ostéopathes (très gros mot à l’époque !) et des parents qui faisaient le choix d’une naissance et d’une éducation alternative, qui place les besoins de l’enfant et de sa famille au cœur de leur préoccupation. L’aventure débute en 1991. Il y a beaucoup de liens avec info allaitement. L’association rayonne sur le 37 et le 41. Ils portaient la voix d’une partie de la population qui interrogeaient le système pendant que la majorité se laissait aveugler par la boîte rose et ses échantillons de couches, de lait maternisé et partait joyeuse à la maternité pour avoir son déclenchement et sa péridurale. Attention, je ne critique pas les personnes qui ont fait ces choix. Je pense, comme c’est encore le cas, que l’information ne circule pas, ces personnes ne connaissaient pas les alternatives possibles. On leur dit que c’est comme ça que ça se passe, ben ok, pourquoi mettre en doute la parole des docteurs et de la société… 


Mais revenons à CNG. Ces gens ont donné leur temps, ont impliqué leur famille. Ils représentaient le village qu’il faut pour élever un enfant. Hier soir les mots de sororité, de bienveillance, de respect ont été prononcés. Mais ils faisaient tout ça sans connaître les termes. Et ça ne se posait pas à l’époque. C’était là, point. Maintenant il faut réfléchir et poser des mots dès qu’on lève le petit doigt, mais juste les mots c’est pas suffisant. Il faut les vivre. Et avec CNG, c’était l’essence même. J’ai eu la chance de pouvoir vivre tout ça, avant de savoir comment il fallait le nommer. C’est peut-être pour ça qu’aujourd’hui ces appellations m’agacent parce que prononcées par des personnes qui ne l’ont jamais vécu mais qui en parlent quand même.
Je ne sais pas si on peut dire qu’ils étaient des pionniers. Surement que les idées communes étaient nourries par des expériences passées. Mais les femmes voulaient reprendre leur pouvoir sur leur maternité, leur choix de naissance, l’éducation de leurs enfants. Et les hommes étaient là aussi pour les soutenir ! 


C’est pour ça le « choisir » de CNG. Il y a souvent eu beaucoup d’amalgames autour de ce nom. Certains nous disaient pro-avortement, d’autres l’inverse… L’idée du choix était diverse, avoir des enfants ou non, accoucher à l’hôpital ou non, accoucher avec la péridurale ou non, allaiter ou non… C’était accueillir tout le monde, chacun étant assez grand pour choisir le mieux pour lui.
« Naître » parce que bien sûr la naissance a une place importante, celle de l’enfant, celle de la mère, celle de la famille. C’est une asso où beaucoup sont arrivées enceintes, d’autres une fois que le bébé était là et puis les professionnels de la naissance qui soutiennent et informent.
« Grandir », ben oui la naissance c’est pas suffisant. On fait quoi maintenant qu’ils sont là ces bébés. On s’en occupe, on papote de comment s’en occuper pendant qu’ils se font des copains. Il y a eu des ateliers Gordon, Faber et Mazlish. Beaucoup de livres aussi qui ont circulé. On a même fait des Pep’s café.

Mais comme beaucoup d’associations, CNG sur sa fin reposait sur quelques membres seulement, 4 pour être précises. Il y a eu des critiques parce que nous n’étions pas assez actives, que nous ne faisions rien… Nous faisions ce qu’il nous était possible. Et puis avec CNG le temps n’est pas le même. On prend le temps. Alors à l’ère du numérique et des réseaux, des réponses immédiates… Ben ça plaît pas. Et il faut se déplacer, c’est plus facile de rester chez soi avec son téléphone et les groupes facebook. Et les confinements successifs ne nous ont pas aidés. Nous n’avons pas pu reprendre les ateliers dans les maternités. C’était plus compliqué pour se faire connaître.  Alors nous avons pris la décision de mettre fin à l’association, mais il nous a fallu plusieurs années pour se décider. 

Autant finir dans la joie ! Nous avons donné rendez-vous aux « anciennes et anciens» pour un resto. J’ai passé une très bonne soirée et j’ai bien envie de garder le contact avec tout ce monde là, pour en apprendre toujours plus sur le monde de la naissance et de l’éducation.

 

 

11 novembre 2023